samedi, mars 21, 2009

2950m+2400m


Par expérience, je sais pouvoir rouler à FTP pendant environ 1h30 en divisant la durée, par exemple en 3 segments de 30 minutes. Au delà, la puissance développée s'effrite rapidement dans la zone L3. Pour cette sortie de quatre heures en montagne avec au moins deux cols (Coq, Porte) de près de mille mètres de dénivelée, il n'est donc pas question de viser une intensité de 100% FTP. Alors que la durée de mes sorties L3 augmente, il est temps d'introduire des sorties en montagne plus courtes mais avec une intensité plus élevée. Je planifie donc en ce mercredi 95% FTP en jetant un coup d'œil de temps en temps que la fourchette 270-300 watts soit respectée, m'assure que la respiration ne s'emballe pas, cherchant avec précaution le meilleur positionnement possible pour le dos et profite du moindre relâchement de pente pour récupérer: il n'est pas question ici de faire un temps ni de battre un record de puissance, juste aligner plusieurs vingtaines de minutes dans la zone cible. Je suis assez surpris de la force des jambes, qui faiblissent moins vite qu'à l'ordinaire.




Au retour, un coup d'œil dubitatif à l'étiquette de la boite de médicament pris pour soigner un rhume apparu la veille me fait mieux comprendre... Vexé que l'entrainement ne soit peut être pas le seul responsable de cette embellie, je refais une sortie de 4 heures du même type, samedi. Les puissances sont également tenues dans la zone 95-100% FTP mais là, l'évolution de la douleur musculaire au fil des différentes ascensions est un peu plus conforme à la réalité du moment.


mardi, mars 17, 2009

Pertes hydriques

Je bois. Beaucoup. Bien sûr, c'est sur un vélo et ce n'est que de l'eau. Sur les lignes de départ des courses, au vu de la taille et du nombre de bidons emportés par d'autres cyclistes, il est clair que certains supportent mieux la chaleur que moi. L'analyse qui suit se veut être une première réflexion sur mes pertes hydriques (volume en eau perdu) au cours de l'effort. Elles ont été mesurées au cours de plusieurs journées en 2008 et correspondent à la différence de poids avant et après l'effort (sans passer par la case toilettes), auquel on rajoute le poids des bidons et de la nourriture éventuellement consommée.

Figure 1

Le graphique ci dessus présente l'ensemble des mesures effectuées, en différenciant les séances sur route et sur home trainer. En effet, on décèle immédiatement une différence notable, la sudation est plus forte dans le dernier cas à température égale. On note également que les pertes hydriques (qui varient de 0,3L/h jusqu'à 2L/h) sont bien sûr corrélées à la température extérieure. Il y'a un certain nombre de points particuliers sur ce graphe, révélateurs: celui sur route à 30°C, 1.6L/h a été relevé au cours d'une séance L4 que j'ai du interrompre, il m'était impossible de respecter la puissance cible, la sensation d'effort étant trop forte. Mais la température extérieure n'est pas le seul paramètre comme le montre le graphique suivant.


Figure 2

Cette fois ci, nous traçons les pertes hydriques en fonction de l'intensité de l'effort, traduite ici par la puissance mécanique moyenne produite. Pas de surprise, la sudation augmente au fur et à mesure de l'intensité de l'effort. Au passage on notera que la puissance moyenne sur home trainer est très souvent plus élevée que sur route et cela pour deux raisons: les séances de home trainer dépassent rarement 1h mais le pédalage est constant, celles sur route ne sont jamais inférieures à 1h30 et les temps de roue libre sont nombreux entre arrêts et descentes.

Pour aller plus loin dans l'analyse, essayons maintenant de voir l'influence des pertes hydriques en fonction de la puissance dissipée par le corps sous forme de chaleur. Le bilan des puissances est:

Pméta=Pméca+Pinterne+Pchaleur

Avec (voir page 174 de I pour une définition plus exhaustive):
Pméta la puissance métabolique
Pméca la puissance mécanique
Pinterne la puissance des forces internes
Pchaleur la puissance dissipée sous forme de chaleur

Le rendement mécanique de travail (~27-29%) s'écrit:

Rtravail=Pméca/(Pméta-Pinterne)
Donc:
Pchaleur=Pméta-Pinterne-Pméca=Pméca/Rtravail-Pméca
Soit:
Pchaleur=Pméca*(1/Rtravail-1)

La puissance mécanique transmise au pédalier est liée à la puissance mécanique enregistrée par le moyeu arrière du PowerTap (PT) par:

Pméca=PT/Rtrans
Soit:
Pchaleur=PT/Rtrans*(1/Rtravail-1)

Rtrans est le rendement de la transmission (~97-98%). Une partie de la chaleur est évacuée par évaporation de la sudation si les autres mécanismes de thermorégulation ne suffisent pas. Pour fixer les idées, un cycliste pédalant à 200W pendant une heure va dégager sous forme de chaleur une puissance de l'ordre de 530W soit ~450KCal/h. Si nous traçons les pertes hydriques en fonction de la puissance dissipée sous forme de chaleur, le graphique a la même allure que le précédent, seules les abscisses changent:

Figure 3

Essayons d'aller plus loin encore, en modélisant la thermorégulation. La puissance dissipée sous forme de chaleur est évacuée dans l'air ambiant selon quatre phénomènes physiques bien identifiés (diffusion, convection, rayonnement, évaporation). On démontre que la puissance totale Pdcr évacuée par les trois premiers modes dans l'air ambiant à température usuelle peut s'écrire sous la forme suivante:

Pdcr=hS(Tcorps-Text)

S et la surface d'échange et h est un coefficient d'échange dont cette référence nous donne une formule approchée intéressante: h=11+5*V avec V la vitesse (la diffusion et le rayonnement interviennent dans la valeur 11). La puissance évacuée par évaporation de la sueur s'écrit, en introduisant PH, pertes hydriques (en L/h) , x le taux d'évaporation de la sueur et H la quantité de chaleur pouvant être évacuée par l'évaporation d'un litre de sueur (correspondant à l'enthalpie massique de changement de phase soit 580 KCal/L):

Pévap=H*x*PH

Le bilan thermique s'écrit alors:

Pchaleur=Pévap+Pdcr=580xPH+hS(Tcorps-Text)

Pour déterminer les inconnues x et hS nous allons faire une régression linéaire sur la puissance thermique évacuée par les phénomènes autres que l'évaporation, c'est à dire sur la puissance Pdcr:

Pdcr=Pchaleur-580xPH=-hS(Text-Tcorps)

En faisant varier x de telle façon qu'à Text=Tcorps=38°C, on ait Pdcr=0 (lorsque la température extérieure est supérieure à la température du corps, l'évaporation est le seul mécanisme pouvant encore refroidir le corps humain):

Figure 4

On note que la dispersion des résultats est plus grande dans le cas du home trainer (le coefficient de corrélation est presque 2 fois plus élevé sur route). On trouve une valeur pour le taux d'évaporation quasi semblable (x~0.4) sur home trainer et sur route. En revanche, la pente des droites donnent deux valeurs assez distinctes pour le coefficient d'échange hS (~8W/°C pour HT et ~12W/°C pour la route).

Rappelons que nous avons une corrélation pour h donnée dans la référence précédente: h=11+5V. Si l'on peut estimer une surface d'échange, ce qui n'est pas aisé, on pourra alors en déduire la vitesse moyenne du vent apparent V qui réalise l'échange convectif. Cette vitesse V est la vitesse moyenne de déplacement sur route et la vitesse du vent généré par le ventilateur dans le cas d'une séance sur home trainer. Si l'on prend comme surface d'échange, la surface totale du corps estimée par la formule de Dubois, S=1.87 m2 (avec m=69kg et h=1,80m), la vitesse moyenne trouvée est négative. Il est clair que l'on surestime la surface d'échange. En effet, le corps est recouvert de vêtements qui limite fortement les échanges thermiques. Un calcul grossier et rapide de la surface d'échange totale des parties non couvertes de 2 jambes, 2 bras et de la tête me donne entre 0,4 et 0,5 m2. Si l'on prend cette fourchette de valeurs on trouve respectivement V=~9-14km/h sur route (ce qui est un ordre de grandeur cohérent avec mes vitesses moyennes en montée, là où la puissance dissipée est bien souvent la plus importante), et V=4-7km/h sur home trainer. Je n'ai pas de données sur le débit d'air du ventilateur actuel. Certains modèles les plus puissants sont annoncés avec un débit d'air de 3600 m3/heure et un diamètre de 45 cm soit une vitesse d'air de l'ordre de 20km/h, c'est à dire capable d'un flux d'air qui serait 4 fois plus important que celui de mon ventilateur...

Conclusions
-Le premier graphique me permet de prévoir en fonction des prévisions météo de température, la quantité de liquide à emporter dans le cas d'une stratégie de course sans ravitaillement, afin de finir avec un déficit hydrique acceptable.

-Les deuxièmes et troisièmes graphiques me rappellent qu'une séance de home trainer, même courte est éprouvante d'un point de vue des pertes hydriques. Et souligne l'importance d'un bon refroidissement: la valeur la plus élevée atteinte sur home trainer (2L/h) a été atteinte alors que le ventilateur habituellement utilisé était éteint.

-Le troisième graphique, enfin, me permet de conclure que le refroidissement sur le home trainer est encore insuffisant. Mais également que la sueur est précieuse. En moyenne, il semblerait d'après ces calculs que seulement 40% de la sueur est utilisée pour l'évaporation de la chaleur produite lors de l'effort.... Et donc que 60% serait perdue. En effet, l'évaporation se fait parfois mal : elle est sensible au degré d'hydrométrie (plus celui ci est élevé, plus elle est faible), paramètre non contrôlable mais également sur l'habillement du cycliste (amples, poreux, clairs), paramètre sur lequel il est possible de jouer... Une étude révèle également un point intéressant, que l'évaporation est favorisée par le courant d'air. En d'autres termes que le taux d'évaporation x est fonction croissante de la vitesse V. Cela n'est pas visible sur les résultats que j'ai puisque le taux moyen semble identique, or je m'attendais de le trouver plus grand sur route que sur home trainer, car d'une part la ventilation est meilleure mais d'autre part qu'une proportion importante de séances sur home trainer se fait par temps de pluie où le degré d'hygrométrie est plus élevé et où l'on attendrait donc un taux d'évaporation plus faible... Ou bien alors que le port du casque a un effet néfaste sur le refroidissement plus important que prévu. Mais, je remarque bien concrètement sur home trainer cette dépendance du taux d'évaporation à la vitesse. En effet lorsque le ventilateur est mal orienté, des fines gouttes d'eau apparaissent sur le bras non exposé au flux d'air, tandis que l'autre semble rester sec. En réalité sur celui ci, le phénomène d'évaporation de la sueur joue alors à plein.

-Je prends beaucoup de plaisir (et de temps) à faire ce type de calculs, mais crains toujours l'erreur ou la simplification abusive. D'autant plus que les mesures effectuées (température par exemple) sont souvent des moyennes sur plusieurs heures lors des sorties sur route. Un dernier graphique permet de nuancer toutes les mesures/hypothèses/calculs précédents. Ainsi, comme la vitesse de l'air V délivré par le ventilateur est constante d'une séance à l'autre, on peut préciser l'amplitude du taux d'évaporation de la sueur avec:

x=(Pchaleur+hS(Text-Tcorps))/580/PH

Et donc tracer le taux d'évaporation obtenu pour chaque séance de home trainer en fonction du degré d'hydrométrie obtenu sur cette station météo locale :

Figure 5

J'aurais aimé trouver une relation décroissante du taux d'évaporation selon le degré d'hygrométrie. Ce n'est pas clairement le cas...

samedi, mars 14, 2009

5h30 entre Chartreuse et Belledonne


Le possesseur d'un capteur de puissance roule souvent seul. Il recherche la solitude une fois qu'il a compris que l'entrainement peut être vu comme une succession d'efforts constants et maîtrisés dans des zones de puissance bien précises dans le but de développer un certain nombre de qualités physiologiques. Et cela sans perdre de temps. Tout le contraire d'une sortie de groupe, où l'allure, le tracé, les arrêts, bien souvent imposés, contrarie ses plans. Cet aspect asocial est un revers de l'utilisation de cet outil.
Heureusement, je redécouvre parfois toutes les vertus d'une sortie accompagnée. Nous étions deux ce samedi à rouler sur les contreforts des massifs de Chartreuse puis de Belledonne. La température rencontrée est printanière (10-20°C) en faisant la boucle dans ce sens là (début du col de Coq, puis Marcieu, et les cols Barrioz, Ayes, Mouilles au retour), le soleil nous accompagnant toute la journée. Enfin nous pouvons rouler plus vite dans les descentes, le froid disparu n'étant plus ce perpétuel frein invisible. En cette période, la durée de la sortie longue du week end est incrémentée à chaque fois de 30 minutes et j'en suis désormais à 5h30. Encore une sortie de 6 heures avant la fin du mois et j'en aurai fini, pour ces trois premiers mois, du travail à L3, nécessaire pour amener le CTL à un niveau suffisant pour les prochaines semaines. Ainsi à nouveau, la zone de puissance recherchée est L3/L4 dans chaque montée en mettant cette fois ci un peu plus de braquet en début de parcours et un peu moins en fin de parcours (afin d'éviter un désagréable retour de bâton sur les montagnes russes du balcon de Belledonne) et je m'applique à essayer de retrouver une position confortable, le dos n'étant pas encore rendu à toute sa souplesse d'avant, comme encore corseté par de longues semaines de home trainer.

jeudi, mars 05, 2009

30/30

Première séance d'intervalles courts. J'ai dimensionné cette séance en utilisant le concept de puissance normalisée. Dans un premier temps, j'avais étudié à nouveau soigneusement le modèle graphique de Thibault qui propose des séances avec des répétitions de 30 secondes et 1 minute de récupération. Mais en calculant l'intensité d'effort IF précisément avec la formule exacte de la puissance normalisée (les intervalles de temps sont courts et approximer la puissance normalisée par NP~(((Teff*Peff^4 + Trec*Prec^4 / (Teff+Trec))^0.25) peut mener à des erreurs non négligeables), je me rends compte que parmi les séances de Thibault, annoncées comme de difficulté relativement identique, certaines (d'après une confrontation entre leur IF et leur durée) seraient en réalité plus faciles que d'autres, en particulier celles avec des temps d'efforts très courts à 30 secondes.

J'ai donc construit une première séance avec 3 séries de 10 minutes avec 30s@130% FTP durant l'effort et 30s@50% FTP durant le contre effort. A postériori (ce fut finalement plutôt 135% FTP en moyenne durant les périodes d'effort) cela donne IF=1.07 sur chaque série (~10mn) et IF=0.99 sur la durée totale (~40mn) des 3 séries entrecoupées de 5 minutes de récupération.

L'effort est différent (plus facile?) qu'un 5*5mn ou qu'un Gimenez même si l'intensité d'effort sur le corps de séance (~45mn) est du même ordre. Ce type de séance serait idéale en préparation d'une course de type critérium simulant des relances rapides et répétées. Là, l'objectif est d'aborder un développement de la PMA en empruntant un chemin différent de celui pris jusqu'à présent. 2 jours plus tard, rebelote en baissant légèrement l'intensité de la période d'effort afin d'effectuer une 4ème série pour accroître le corps de séance à 55 minutes. Car je ne suis pas sûr du tout du bénéfice supérieur de ce type de séance par rapport à des intervalles longs de 3 à 6 minutes, mais il me fallait essayer.

Les séances plus intenses effectuées en février ou mars, selon les années, permettent d'élever la partie droite de la courbe IF (intensité d'effort) en fonction de la durée, obtenue sur home trainer et tracé ci dessous en bleu. Un point haut de cette courbe est généralement donné par un test maximal (CP3 ou CP20). A partir de ce point, il est possible de faire passer le profil théorique (en noir) que l'on peut comparer à celui effectif, mesuré par le capteur de puissance. Lorsqu'il y'a une différence importante entre les 2 courbes à une certaine abscisse, c'est simplement que je n'ai pas encore effectué d'effort maximal sur cette durée:



La courbe théorique est tracée en utilisant le modèle de Monod-Scherrer pour des durées T de quelques minutes (la puissance est Pc+AWC/T) et celui de Peronnet-Thibault (la puissance au delà de quelques minutes est Cste-E*ln(T)). Ce dernier modèle est pour la course à pied mais peut également s'appliquer à d'autres sports aérobies selon Thibault. Je choisis, arbitrairement, T=20 minutes comme point de raccordement des deux modèles (les tangentes en ce point semblent continues, au moins graphiquement).

Signe, après de longues semaines de maintenance, que le corps est à nouveau poussé dans ses retranchements lors de cette séance, les veines saillent le long des avants bras. Au bout d'une heure, il me reste encore quelques minutes que je décide d'effectuer à L3 et relance à nouveau les jambes mais suprise, la puissance vient accrocher la zone au dessus (~95-100%FTP) avec une nette impression d'aisance. Le contraste avec les cinq minutes d'échauffement dans la même zone est saisissant.